Romance en solo

Rejoindre le sable abandonné par la mer sur lequel, aucune muraille, aucune clepsydre n’attend, c’est juste un voyage en train intérieur. En chemin, toujours en chemin, ne rien faire d’autre qu’être en chemin, avec les autres, avec personne. Tu lisais Blaise Cendrars et toute la mer que tu voyais à travers les quelques pages pincées entre le majeur et l’index, allait et venait, sans rien faire d’autre que se balancer. Elle aussi voyage, elle est en chemin, la mer qui nous fait être le voisin de tout le monde. Le mouvement tranquille d’une vie,  l’agitation rythmée du wagon, voici le voyage.Gris comme un Cap d’infortune au bout d’une péninsule et blanc comme l’écume, ce sont les nuances de l’horizon par le fenêtre.Et entre une couleur et l’autre, une liberté, la tienne.Une liberté qui ne cesse de vouloir sa place, car plus elle sera grande, plus profondes seront ses racines.Une cathédrale invisible cherchant les abysses du Ciel, creusant les tréfonds de la Terre avec des branches, des rameaux, des brindilles et des aiguilles…du Midi? Ce soir, tu as vu les anges à travers les nuages…tout en douceur et en puissance. Ils étaient là et tu les as aimés, tu leur as demandé de te bénir, puis tu as regardé le Soleil s’éclipser. C’est l’heure où tu te souviens que rien n’est grave, tes fantômes vont et viennent telles d’inoffensives passerelles reliant tes moments, tes morceaux de vie les uns aux autres.

Passerelles.

Encore un objet sur lequel on passe, la passerelle est un petit galet sur le chemin, vers le passage. Tu avances, tu fuis, tu bouges, tu tournes en rond sur toi-même, puis tu ouvres la porte de sable qui donne sur la mer; colosse imprenable qui fait ce qu’il a envie.

Tout s’ouvre.

Vent

Odeur

Le sel sur ta peau plus caramel que ton enfance, douce protection de toi contre toi

De toi contre toi

De toi contre toi

De toi contre moi

Tout contre moi

Toi tout contre moi

Contrôle moi

Tout de toi contre moi

Tout de toi en moi.

Bruine, petites perles de pluie, hydratation matinale sur la terrasse. Tu attends le café, avant de rejoindre les montagnes de sable et les fresques de ciel qui entourent tout le reste. Bleu piscine, une scie circulaire qui crie, tu voulais juste un café bon sang! Quand le temps s’arrête dans un bled, c’est tout le reste qui ralenti et avance à l’allure de l’escargot. Valons, arbres et odeurs de ciste esteva, puis place centrale d’un village à Boliqueime, sorte de Far West suranné. Voyage romantique, romance seule avec tout ce bruit dans tes pensées. Les hommes qui entourent ta vie sont plus vieux que toi, ne fais rien, laisse faire la vie. Toi tu observes les gens sur la place, plutôt blancs et rouges; des nordiques mal bronzés? Trop bronzés sûrement. Et le racisme et la discrimination? Et le féminisme? Et les droits de l’enfant et la pauvreté dans le monde? Et la censure? Et l’égo des artistes? Ce voyage que tu fais, il te fait faire le ménage des pensées et jugements qui roupillent dans le grenier de ta tête pensante, émotive. Tu es au bord de l’eau et au bout de l’horizon, au-delà de l’océan tu devines l’Argentine. La mer, qui nous fait être le voisin de tout le monde, a rapproché l’hémisphère sud de tes pensées.

BRILLANTINA MELOTINA

cropped-dscn1194.jpg

C’est un jour où il fait nuit comme tous les autres jours, normal puisqu’il est 22h34. Il est tard et Jorginho a les yeux grands ouverts sur l’espace anthracite de sa chambre à coucher. Il a peur de mettre le pied hors de sa couette, alors il se barricade sous son duvet à plumes et s’immerge dans la sueur… il transpire comme un petit fennec du désert, quand le désert est une mer en flammes. Pour faire le fort, être brave comme papa et maman il compte dans sa tête jusqu’à dix, plusieurs fois. Il est une heure trente-deux du matin, Jorginho a perdu le compte, tous les chiffres qu’il connaît y sont passés, mais rien n’y fait Jorginho ne dort pas. La seule chose qui pourrait le rassurer, le calmer, serait la venue express de la Fée Bleue, celle qui est apparue à Pinocchio, sans ça, sans la présence d’une Fée ou d’un magicien, Jorginho n’arrivera pas à s’endormir. Bien-sûr, il aimerait être dorloté par ses parents, mais les parents dorment et ne veulent pas être dérangés, parce que demain il faut se lever tôt pour partir au boulot. Les heures s’amoncellent sans retenue dans la chambre de Jorginho qui a les pieds bien rangés sous le duvet. La fenêtre est entre-ouverte, Jorginho a très envie de guigner à l’extérieur, mais il a encore peur du noir, ce noir qui ne laisse rien voir.

Paupières scellées.

Jorginho allongé.

Tartines et chocolat-chaud vite, vite et re-vite, l’école n’attend pas, Jorginho se dépêche parce qu’il aime bien aller avec les copains à l’école. A l’école, il y a aussi ceux qui n’aiment pas le noir dans la chambre. Mais lui, il est le seul qui en parle, il en parle avec Gina et Lucas. Gina elle a une petite veilleuse pour que papa et maman puissent avoir la paix et Lucas il a le droit d’appeler une fois ses parents. Jorginho il a le droit de compter jusqu’à dix, c’est peu. A la veille des grandes vacances, papi et mamie sont venus pour prendre Jorginho avec eux, ils partent en Espagne comme chaque année, rejoindre des amis. Jardin, piscine, promenades….il y a même un chien qui habitera avec eux pendant les vacances, c’est Spoutnik, il est complètement dingue et Jorginho l’adore ! En voiture la compagnie ! Pendant le trajet papi fume la pipe et mamie chante des chansons de son époque. Le temps passe, les paysages défilent, le soleil est au sommet de sa joie, là-haut dans le ciel qui cache bien des mondes et des secrets.

La nuit est loin.

Ils y sont ! Toutes les valises dévalent hors du coffre de la voiture (une vieille Fiat), mamie n’a pas de force pour les porter alors elle les fait basculer dehors et elles tombent les unes sur les autres. Papi ne dit plus rien, il connaît la combine et soupir, sourit, heureux de savoir que le temps passe et que les habitudes restent. Dans la maison espagnole, il y a une chambre plus petite que les autres avec une immense fenêtre et c’est là que Jorginho veut dormir. Tous les soirs les adultes restent sur la terrasse jusqu’à tard, ils papotent, ils chantent, ils rigolent. Jorginho s’endort souvent sur le transat, puis c’est papi qui le prend et le couche dans sa chambre. L’enfant n’a pas d’amis de son âge ici, mais il se sent bien. Au fond du jardin il y a une balançoire sous le figuier et un étang avec des nénuphars et quand il s’endort, il peut regarder par la fenêtre du toit qui donne une vue plongeante sur les étoiles…toutes les étoiles. Le matin sent la terre, le foin frais et la promesse d’une limonade aux glaçons, ça change des tartines et du bruit de l’immeuble où il habite, ici pas de porte que l’on claque pressé de partir travailler. La cuisine est un tapis volant sur lequel on grignote toutes les miettes du bonheur et comme tout le monde est gourmand il y a toujours du pain émietté partout, en somme, on laisse les miettes se faire. Depuis trois jours c’est la canicule , la chaleur inonde même les plus petits espaces sombres de la maison, les villes sont à sec, la chaleur étouffe tout. L’air morne du soir est une respiration suffoquée, comme un asthme qui n’en finit plus de respirer à petit feu. Jorginho joue dans la cuisine, il joue avec le ventilateur et il s’imagine pouvoir voler… à vrai dire il n’est pas bien épais, avec ses cheveux en bataille, s’il pouvait s’envoler à travers le ciel étoilé il aurait l’allure d’un oiseau fou, fou de beauté. Les heures sont longues pour un petit garçon, Jorginho a soif d’aventures, il aimerait tellement avoir quelqu’un de son âge pour pouvoir se cacher sous les branches des arbres, se rouler par-terre et lancer des cailloux dans l’étang.

La nuit avance, noiraude, trouée d’une myriade de petits points blancs scintillants qui veillent sur Jorginho. L’enfant « cheveux-bataille » sourit, la tête posée sur la paume de ses mains … Il sourit parce qu’il imagine que la petite étoile qui est près du bord de la fenêtre lui sourit, elle aussi. Dans un long bâillement il s’adressa à l’étoile « tu t »appelles… » mais il s’endort avant de finir sa phrase et le sommeil prend soin d’envelopper ses derniers mots pour ne pas qu’ils se mêlent aux rêves qui voyagent, invisibles, de chambre en chambre, d’une vie à l’autre.

Jorginho voyage vers ses rêves.

Grillons et grenouilles déclament jusqu’à l’heure des étoiles…

Le lendemain est passé, puis tous les autres jours comme les perles d’un collier qui glissent d’un bout à l’autre du fil, jour après jour le soleil se lève et se couche, la lune se couche puis se lève, mais aujourd’hui c’est samedi et le samedi on va au marché et c’est rigolo de voir que papi et mamie se chamaillent parce qu’ils aiment acheter leurs légumes chez des maraîchers différents. Aujourd’hui Jorginho est malade, il a mangé trois glaces et cela lui a retourné le ventre, alors mamie est venue avec lui dans sa chambre pour lui raconter une histoire. Elle est couchée tout contre lui et leurs cheveux dont les générations ne peuvent se confondre, se mélangent. Vu d’en haut on voit clairement une jolie pelote de fils noirs qui embrasse une belle banquise de cheveux blancs dépigmentés par la course du temps. Mamie s’endort avant Jorginho. Il a moins mal au ventre, même s’il est gonflé comme un ballon, alors il se lève, essaie de passer par-dessus sa grand-mère qui a l’air d’une petite fille, car elle est toute recroquevillée. Il est debout sur le lit, saute et tombe bruyamment sur le tapis !

Silence.

Respiration profonde de mamie.

La lune est lumineuse ce soir-là, sa lumière éclaire toute la chambre, les étoiles sont moins visibles malheureusement. Jorginho se couche sur le tapis au centre de la chambre et s’endort illuminé, baigné de lune et aimé des étoiles. Quand il se réveille au beau milieu de la nuit, la lune n’est plus là et toutes les étoiles sont réunies dans le ciel formant un chaos de millions de petits points argentés. L’enfant se tourne, cherche sa grand-maman du regard, elle est partie et a laissé dormir Jorginho sous la lune, l’a recouvert d’un drap qui sent le citron. C’est la meilleure mamie ! Il compte les étoiles. 1, 2, 3, 4… la petite étoile qui d’habitude est près du bord de la fenêtre a changé de place, mais Jorginho sait pourquoi, c’est parce que la Terre tourne – la maîtresse l’a déjà expliqué en classe avec un ballon et une lampe de poche. Pourtant, cet astre brille beaucoup plus que les autres et c’est à cela qu’il le reconnaît. Un soir, il avait voulu lui donner un nom et s’était laissé éblouir, hypnotisé par son incandescence. Ce soir, ça lui reprend il projette à haute voix des sobriquets aux étoiles et dit n’importe quoi ;

« patate brillante » et il rit, tellement ça lui semble drôle ! Il recommence de plus belle :

« estrellita « jumpalala», « brillantina melotina»

Et il rit encore plus.

Là-haut, l’étoile le regarde, impassible.

« Brillantina Melotina », dit un souffle-murmure venu de dehors.

Jorginho se cache sous la couverture !

Qui a dit « Brillantina Melotina » ?

La peur le sert à la gorge, comme quand il est dans sa chambre, seul, loin des vacances. Il se met en boule et commence à transpirer de chaleur et de peur. Pourtant il est sûr que quelqu’un a parlé et ce n’était pas lui.

Le coeur qui bat.

Il avale sa salive et courageusement demande :

« quoi ? » 

Il attend et personne ne répond, alors il sort tout doucement sa tête hors du drap et voit qu’il est seul dans sa chambre, au milieu du tapis et toutes les étoiles le regardent depuis le velux. Maintenant il n’ose plus se lever pour aller dans son lit, c’est bête quand même!

« Tu devrais aller dans ton lit, Jorginho »

La voix est là, cette fois il en est certain.

Jorginho ne respire plus. Il avale une salive sablonneuse, tout son corps tremble et transpire, quelle angoisse !

Une éternité qui file, une seconde qui s’allonge.

« T’es vrai ? », demande Jorginho dans un étouffement de crainte.

Dans nos souvenirs d’enfance, pour certains d’entre nous, les jouets et les objets étaient capables de parler et quand on entrait dans la pièce, ils se taisaient parce qu’on était là. A cet instant pour Jorginho – qui réfléchit très vite – dans la chambre il n’y a que la commode, le lit, la lampe et Tiro, sa peluche éléphant à qui il manque une défense et qui n’a jamais parlé, du moins pas en sa présence. Et puis, hors de la fenêtre il y a toutes ces étoiles malicieuses et muettes qui le regardent. Personne d’autre. Alors, il pose à nouveau sa question avec la peur de celui qui saute dans le vide :

« T’es qui ? »

La voix aussi vraie que nature lui répond, enveloppée de velours :

« Oui, Jorginho ».

Le petit garçon sort sa tête hors du drap et ses yeux fouillent, apeurés, l’espace autour de lui.

Personne.

Dehors on entend Spoutnik qui chouine.

Jorginho, là tout de suite, il veut sa maman, sa mamie, Gina, Lucas, Spoutnik! II regrette d’avoir voulu rester tout seul dans sa chambre, oui, oui et re-oui ! il aurait aimé, là à cet instant avoir l’épaule de papa et les genoux de papi pour pleurer.

Cette voix veloutée s’adresse à lui :

« Jorginho, n’aie pas peur », elle emplissait toute la chambre, on aurait dit une voix sortie d’une histoire.

« … Mais t’es qui ? » demande Jorgihno, qui – il faut le dire-  était, lui, dans sa chambre et que la voix, elle, n’était pas dans sa chambre mais dans celle de Jorginho !

« Viens voir les étoiles et je te dirai qui je suis ».

Le silence l’immobilise, il est muet !

On l’invite à voir les étoiles, une voix lui demande de voir les étoiles depuis sa chambre !

Il se lève tout plein de peur.

« Jorginho, je ne vais rien te faire, viens vers la fenêtre ».

Il avance, tremblant.

« Jorginho, regarde ! »

Mais l’enfant ne voit personne, il est au centre du tapis, lève la tête mais il ne voit pas d’où vient la voix. Soudain, du bord de la fenêtre, un bras se tend :

« Viens, je vais t’aider à monter sur le toit »

Le petit garçon s’approche du bord et dit timidement au bras qui est là :

« Voilà, je suis ici ».

« Accroche-toi, mets tes pieds sur ma main et accroche-toi à mon bras, je suis Mafi Gosa, viens donc!»

Jorginho assis sur le toit, inondé de peur et de lumière céleste regarde autour de lui et n’en revient pas, c’est la première fois qu’il voit le ciel en entier et de nuit! La voix est celle d’un homme très grand, on dirait qu’il a des ailes noires un peu déchirées, mais non, ce n’est qu’une cape qui le couvre des épaules aux genoux. A ses côtés Jorginho a l’air d’un poussin et d’ailleurs, malgré toutes ses réticences, son réflexe est de se calfeutrer dans le pli de l’impressionnante cape bleue qui entoure cette voix d’homme sortie d’une histoire. Toute la maison dort, sauf Spoutnik qui regarde vers le toit en remuant la queue. L’horloge suit son tic-tac routinier et elle arrive bientôt à ses deux heures quarante-cinq du matin. Le petit garçon ne parle pas, il est impressionné.  En attendant, les étoiles les regardent, la lune contemple d’un oeil bienveillant.

« Tu veux connaître le secret des étoiles, Jorginho ? »

« Les étoiles ont des secrets ? »

« Toutes, elles sont comme ça, elles vivent des choses incroyables et après, comme elles sont coquines elles se taisent. Cela devient un secret »

« Pourquoi ? »

« As-tu des secrets, Jorginho ? »

Le petit garçon ne répond pas.

« Tu sais ce que c’est un secret ? »

« Je crois », répond Jorginho.

« Qu’est-ce que c’est ? » lui demande cette voix.

« C’est quand quelque chose qui fait battre ton cœur….tu ne dis rien à personne, mais tu y penses souvent….tu penses que c’est quelque chose que tu es le seul à savoir et c’est un secret ».

On dirait que la lune leur sourit. Jorginho est collé à la cape bleue et ne tremble plus.

« Merci pour ton explication, Jorginho. Les secrets c’est ce que tu as dit et plus que ça encore. Un secret, c’est un tout petit morceau de ta vie qui ne ressemble à rien au début et un jour quand tu n’y penses plus, quand tu es grand et que tout a changé autour de toi, un jour comme ça, sans savoir exactement pourquoi, tu te souviens de ton secret, celui qui faisait battre ton cœur très vite et que tu n’as raconté à personne. Et le moment où tu t’en souviens tu te rends compte que ce secret a été très important »

« Pourquoi ? »

« Parce que si tu ne l’as pas dit, c’est parce que pour toi, il avait une valeur que personne d’autre ne pourrait comprendre ».

« … Qu’est-ce que c’est une valeur ? » demande Jorginho.

« C’est quelque chose que tu crois être très important pour toi, pour te sentir bien tout seul et bien avec les autres. Si tu as des valeurs, quand tu as un problème, tu sais comment te comporter ».

Les étoiles sont toujours aussi muettes et scintillantes.

« Tu vois cette étoile là-haut ? “ lui dit cet homme, “Elle s’appelle Falani, elle arrive toujours après les autres, on ne la voit que quand la lune commence à descendre »

« Elle est toujours en retard ? » demande Jorginho.

« Oui, elle est comme ça et on ne peut pas la faire changer. Celle qui est à côté, c’est Minola, elle brille peu, mais elle est grande, c’est pour ça qu’on la voit bien. Moi je suis Mafi, je ne brille pas »

«  C’est parce que tu es très grand ? » questionne Jorginho.

Mafi éclate de rire et Jorginho aussi, il met ses mains devant la bouche et continue de pouffer, content ».

Au loin, on entend un chien qui aboie, une porte claque au rez-de-chaussée.

« Va te coucher, petit»

« C’est quelle heure ? »

« Il est trop tôt pour que tu sois réveillé, je vais m’en aller moi aussi. »

« Tu vas revenir…Mafi ? »

Mafi acquiesce, prend l’enfant dans ses bras et le porte jusqu’à son lit.

« Quand je reviendrai, tu auras trouvé le nom des autres étoiles », mais Jorginho a déjà les yeux éteint et la respiration profonde.

« à bientôt ».

Au petit-déjeuner, Jorginho n’était pas à table.

« Le petit n’est pas réveillé ? » demande quelqu’un.

« Il dort profondément, il devait être fatigué », Mamie était allée le voir à l’aube et l’avait trouvé endormi avec un sourire aux lèvres, couché sur le dos les bras et les jambes écartés, en étoile. Aujourd’hui, c’est jour de fête ! Les amis des adultes ont invité une musicienne qui est venue avec toute sa bande ! On danse, on boit, on parle et on recommence ! On boit, on danse, on tourne, on titube et on  tombe de joie et ainsi de suite jusqu’à épuisement. La nuit est belle et chaude, Jorginho est couché sur l’herbe il regarde le ciel, compte les étoiles, leur donne des noms improbables « Minola », puis il s’arrête et réfléchit ; d’où lui vient ce nom qu’il a déjà entendu ? Spoutnik chouine et s’agite, il aboie en direction du ciel, il chouine puis se couche à côté du garçon la queue entre les jambes.

“C’est une grande étoile qui ne brille pas beaucoup” … Cette voix !

L’enfant se lève d’un bond sans se retourner et court en direction de la terrasse avec Spoutnik à ses trousses. Il cherche mamie, se faufile entre les jambes et jupes qui virevoltent jusqu’à la trouver, assise, élégante comme d’habitude et un grand verre d’eau dans la main. Il s’accroche à elle, pose sa tête sur ses genoux, essoufflé.

« Qu’est-ce que tu as ? Tu as couru ? » demande Mamie, joyeuse.

« Mamie… »

« Mon chéri, tu es tout bizarre, tu veux un verre d’eau ? » et elle le prend par la main jusqu’à la cuisine où elle lui prépare un grand verre de sirop cerise. Il boit jusqu’à perdre son souffle et termine par un oufffffffff … de soulagement. Mamie le regarde, elle attend que le petit-fils raconte des choses, ses choses.

« Mamie … il y a quelqu’un au fond du jardin »

« Comment? »

« J’ai entendu parler une voix et je suis parti en courant »

« Où ? » demande Mamie curieuse, tout à coup.

« Vers le figuier , voilà »

« Tu veux qu’on aille voir qui c’est ? À deux on n’aura pas peur et Spoutnik vient aussi» dit-elle avec un joli sourire.

« Non, n’y va pas, mamie»

« Alors viens, on va se coucher ».

Mamie et Jorginho sont dans la chambre à présent et ils se dessinent sur les bras avec des stylos noirs. La musique de la terrasse où les amis s’amusent, entre par la fenêtre, envahit tout l’espace et ça fait du bien. Quand Jorginho se réveille, il entend sonner trois heures au clocher de l’église. Mamie est endormie à ses côtés les bras, le cou et le visage dessinés.

« Jorginho, viens voir les étoiles ».

Le petit garçon reconnaît la voix qui l’appelle et va à la fenêtre, deux bras puissants le portent et il se retrouve assis sur le toit, collé à Mafi.

« tu as bien dansé, Jorginho ? Tu as eu le temps de nommer des étoiles ? »

Jorginho rigole un peu, il dort à moitié.

« je n’ai pas dansé, je n’ai pas donné de nom aux étoiles »

Mafi sourit et entoure l’enfant qui somnole contre lui, puis il lui parle de toutes les choses que personne ne sait sur les étoiles et sur la lune. Quand il a fini, on entend sonner plusieurs coups au clocher, le ciel est mi sombre, mi clair, alors il secoue doucement Jorginho qui se réveille et l’aide à descendre dans sa chambre. Le lendemain, l’enfant remonte sur le toit où Mafi l’attendait. L’air est chaud, ils discutent.

« Cagapito, c’est une étoile que tu as nommée ? » Demande Mafi, content de voir que son jeune ami a commencé à nommer les étoiles. L’enfant acquiesce avec la tête, il se tourne vers Mafi et lui dit,

« Il y en a beaucoup, je sais pas si j’aurai des noms pour toutes les étoiles ».

« Tu auras toujours des noms pour les étoiles, Jorginho ».

« Pourquoi tu viens à ma fenêtre ? ».

Mafi s’attendait à cette question, il en est presque soulagé.

« Je suis venu à ta fenêtre parce que je t’ai vu de là-haut, une nuit, puis tu t’es endormi sur le tapis illuminé par la lumière des étoiles et de la lune. »

« Mais qu’est-ce que tu fais quand tu ne viens pas me voir ? » demande l’enfant.

« Je survole et flotte entre le Ciel qui est très loin, vraiment très loin d’ici et la Terre….sans arriver à rentrer chez moi »

« Chez toi c’est loin ? »

« Oui, c’est là-bas », et Mafi pointe de l’index une zone à peine visible.

« Les petits points blancs ? »,

« Oui, c’est la constellation du Berger, c’est chez moi, mais je ne peux plus rentrer », il tourne la tête et sers très fort Jorginho.

« Tu veux que je demande à Papi et Mamie si tu peux rester ? »

Mafi éclate de rire, il n’avait pas envisagé la possibilité de rester vivre chez Jorginho.

« Jorginho, merci beaucoup, je serais resté, mais je dois retourner dans ma constellation et c’est toi qui va m’aider. »

« Mais comment ? »

« C’est très facile, il te suffit de donner un nom à toutes les étoiles que tu verras ce soir, toutes, sans exception »

« Et après tu rentres ? ».

« Et après je pourrais rentrer chez moi. Tu sais, je suis le berger des étoiles, mais une nuit, une étoile s’est égarée et en allant la chercher pour qu’elle retourne auprès des autres, je suis sorti de la frontière du Ciel et je n’ai plus pu revenir ».

« Et elle ? » demande l’enfant.

« Elle ? Elle a filé rejoindre les copines qui l’attendaient. Mais moi, je ne suis pas aussi rapide et quand je me suis aperçu que j’étais allé trop loin, les nuages derrière moi s’étaient refermés ! »

Jorginho était triste pour son ami Mafi, il fallait vraiment qu’il nomme les étoiles pour l’aider à rentrer, c’était important.

« Ça fait longtemps que tu es entre le Ciel et la Terre ? »

« Oui, très longtemps. Je n’ai pas croisé d’enfants qui se levaient la nuit pour contempler les étoiles, jusqu’à ce que je te voie ».

Cette nuit-là, ils l’ont passée à donner des noms aux étoiles. Au petit matin, quand Mamie est entrée pour embrasser son petit-fils elle ne le trouva pas dans la chambre, ni dans le jardin, ni ailleurs. Jorginho était introuvable ! Réunion et grande inquiétude dans la cuisine.

« Mais qu’est-ce qu’on va faire ? On appelle la police ? » propose quelqu’un.

« Non, on va attendre, il est peut-être allé faire un tour», dit Papi.

Spoutnik n’arrêtait pas d’aboyer en direction de la chambre de Jorginho, impatient, excité. Alors Mamie le lâcha et il courut dans la maison jusqu’à la chambre de l’enfant, arrivé là il aboya encore plus, tournant en rond sous la fenêtre qui était grande ouverte. Papi et son copain montèrent sur la table pour voir à l’extérieur, Mamie assise sur le lit les regardait faire, inquiète. Sur le toit, à côté du bord de la fenêtre, Jorginho dormait paisiblement enroulé dans une grande cape bleue-nuit, le sourire aux lèvres. Alors Papi le prit dans ses bras et le ramena dans la chambre.

Un enfant endormi.

Le sourire aux lèvres.

L’été passe.

C’est la rentrée scolaire, tous les enfants se préparent à entrer dans le monde des chiffres et des lettres, de la récréation et des évaluations. Jorginho est content de revoir les copains ; Marcel, Lucas et Gina. Ils se racontent leurs grandes vacances, mais Jorginho ne dévoilera jamais son secret, parce qu’il a de la valeur pour lui. Cette nuit-là, puis toutes les autres jusqu’à l’âge d’homme, Jorginho s’endormit comme un panda, la fenêtre ouverte sur le ciel.

FIN

Mes remerciements vont à Jorginho à sa voix et à sa spontanéité qui ont inspirés cette histoire.

Remerciements à Marco Santos – le berger Mafi Gosa- sans qui je n’aurais pas connu la voix de Jorginho.

Remerciements à António Gomez -acteur et ami – pour la révision du texte.

Remerciements à Michel Sandoz -écrivain et ami- pour la relecture.

Remerciements à Emilie Sandoz -amie d’enfance et illustratrice merveilleuse- pour son soutien et les rigolades.

Le temps de l’enfance est une bénédiction.

Sónia Vieira Cardoso

 

Sonhadores

cropped-dscn1194.jpgÉ tudo tão mais fácil para os sonhadores, os idealistas, os inconformados. Há sempre uma convicção pela qual lutar, uma palavra a dizer, um amor a realizar. Há sempre um tudo, onde os outros não vêem mais nada.
De onde te escrevo, da vida que escolheram para mim, não resta nada. Deixei morrer os sonhos, os ideais, o amor. Hoje, sou como todos eles, os conformados, os realistas. Hoje, sou todos, só não sou eu. Vítima não serei, querer ser como todos e aceitar as suas escolhas, foi uma decisão que me pertenceu. Eram tempos difíceis para os sonhadores, a solidão levou o melhor de mim.

As palavras partiram, não restava nada para as alimentar. Tanto tempo depois, tentei convencê-las a regressar. Recorri à nostalgia, ao que restava de um amor que lhes deu vida. Pedi-lhes que voltassem, nem que fosse por um momento, para escrever as últimas palavras de amor, antes que só reste cinza, que o vento a leve e só fique este nada que as fez partir. Elas aceitaram ser as últimas palavras do que resta do sonho:

Um dia, como todos os sonhadores, descobri este cliché: o amor é o motor da vida. Mas não o escrevi em nenhuma carta ou poema, corria o risco de ofender os poetas que encontraram tantas maneiras bonitas de sublimar esse amor-motor. Hoje, antes que as poucas palavras que convenci a regressar me abandonem mais uma vez, quero escrever sobre a história bonita à qual gostaria de ter dado um final feliz. Achamos sempre que temos muitas histórias bonitas para contar, mas quando confrontados com a questão: e se só pudesses reescrever um final feliz, qual dessas histórias seria reescrita?
Nesse exacto momento sabemos, sem qualquer dúvida, qual é a história bonita da nossa vida. A minha és tu.
Mas, um dia eu deixei os ideais e os sonhos para ser mais uma como todos os outros e isso não se prevê, porque, dir-me-ias tu, quem se alimenta de sonhos não pode viver de realidade.
Tu tinhas todos os ideais, eu tinha todos os sonhos. Naquela altura não havia tempo certo. A nossa história era tão simples como é o amor. Era desafiar as leis de um mundo paralelo.

Um dia, vi o mundo dos outros, achei então que era mais calmo, mais sensato e que eu já não tinha mais tempo para ideais ou sonhos. Eles estavam certos e eu estava errada, não havia amor sem materialização e tu quebravas todos os códigos desse mundo paralelo. Disseste-me, quando me viste partir, “O que nos aconteceu? Não te quero perder”. Aquele momento foi a materialização de tudo o que sempre guardamos.

Eu parti. Do outro lado, do lado dos realistas e dos conformados, não encontrei nada. Eles estão todos aqui, para me felicitar pelas escolhas sensatas. Eles estão todos aqui para me relembrar que a realidade foi mais rápida do que os sonhos. Ah, se me ouvissem! Dir-me-iam incrédulos que essa guerra já passou e que escolhi o melhor lado da batalha. E acrescentariam surpreendidos que pareço uma idealista inconformada a questionar uma verdade que todos sabem absoluta! Os sonhadores não vão longe, alimentam-se de um mundo que ninguém compreende, explicar-me-iam, eles vêem um tudo onde não há nada!

Espero que continues a sonhar, de onde estou não vejo nada e sei que as palavras vão partir. Não há sonho nem amor que as alimente. Se um dia as encontrares, espero que elas te contem o final feliz que gostaria de ter escrito.

Lara Lia

HOJE SIM É NATAL

cropped-dscn1194.jpg

Fumegava o bacalhau ladeado por hortaliças verdes e tubérculos amarelos, farinhentos. Estava a toalha vermelha impecavelmente engomada a suportar tudo. Os melhores pratos. Os melhores talheres. Os melhores cristais. O azevinho ao centro, a compor. A distinguir de Natal a mesa. Depois nós todos. Sem lugares marcados. Dispostos como calha, como nos apeteceu. Já fomos mais, já fomos tantos que a mãe pedia ao pai para trazer mais uma mesa, para juntar à grande dizia ela. Precisamos de espaço, de conforto, vincava. Hoje não. A mesa mais pequena, já deixou de encaixar na grande. Já não é preciso. Até porque nem agora a mesa grande se atesta. Ficam pratos por pôr. Cadeiras sozinhas. Espaços vazios, que nesta altura são relembrados a dobrar. Os rostos estão lá. Os corpos estão lá. Estão todos sem marcar presença. Ficam nos nossos sentires. Nas recordações longínquas ou mais próximas que vamos todos tendo. O avô já não está, o outro avô já não está, o pai também já se foi, o tio, a tia, já só sobra uma avó e nós todos. Ainda somos muitos, suficientes para me trazerem à memória as mais doces recordações de infância. Havia mais luz, havia mais cor, havia mais gente, sobretudo mais gente. Eu, as manas e os primos a corrermos pela casa toda, ansiosos e excitados pela meia noite que tardava em chegar. Ansiosos por saber que o Pai Natal incrivelmente faria uma paragem rápida em nossa casa para nos dar tudo o que lhe tínhamos pedido. Foram sempre os Natais mais ricos. Mais inocentes. Hoje não. Hoje desaparece o encanto. Desaparece ao toque de plins, notificações invasoras.

Comentaram no meu perfil, meteram gosto na minha foto. Vão a futilidade e a inércia de um mundo virtual apoderarem-se dos resquícios de Natal que eu queria que sobrevivessem até que o último de nós tombasse.

Hoje não. Hoje, em definitivo, não.

Todos sucumbidos pelo poder atractivo, dissocial, deste barulho tecnológico que nos corrompe o afecto e a cumplicidade. Serei o único de olhos soltos? De olhos livres? Eu e a avó. Eu porque escolhi assim, ela porque o esgotar-se do seu tempo não lhe impulsiona sequer a vontade de embarcar neste mundo alternativo. Já colocaram gostos e comentários na foto da nossa mesa, interrompe um sobrinho. Faltou pouco para um instantâneo vou ver colectivo. Eu fiquei ainda mais silencioso, vexado. Os gostos e comentários, queria-os eu ali, deles todos. Mas ninguém se movimentou nesse sentido. Nem sequer souberam medir o enfastio visível quando retomei a palavra e lhes disse, já largavam os telemóveis não? Nesse momento a avó lançou-me um olhar condoído. Fora realmente a única que me percebera. Que chato, disse a mana.

Não tens redes sociais? Não. Não tenho.

Foram imediatos os risinhos. Actualiza-te tio, toda a gente tem. Eu não quero ser toda a gente repliquei. Já aceitei os que partiram sem o quererem. Custa-me agora aceitar os que se ausentam porque querem. É como se nesta mesa apenas estivesse eu, a avó e o bacalhau. E finalmente a mãe pousou o telemóvel e no seu papel de matriarca, roubado à avó numa sucessão simples de mais vigor disse, vamos comer larguem lá os telemóveis. A ordem foi de imediato cumprida. A credibilidade da mãe era sobejamente mais eficaz que a minha e totalmente notória quando todos abandonaram, fosse nos bolsos ou no rebordo da mesa, os telefones. O bacalhau que começara entretanto a esfriar, tinha agora o fim para o qual tinha sido trazido hoje à mesa. Desfilavam as travessas. Tilintavam os talheres. Lotavam-se os copos com vinho. Mastigava-se. Conversavam. O Natal espraiava-se novamente pela mesa. Éramos enfim a família de tantos Natais. A mãe acabava sempre por relembrar como o pai se ausentava discretamente para assumir o papel de Pai Natal. Sorria enquanto o acusava de ficar mais excitado que eu, as manas e os primos. Impecavelmente mascarado lá aparecia ele. Com as barbas a disfarçarem-lhe as feições que ele temia que reconhecêssemos. O fato vermelho e a barriga produzida por uma almofada bem amarrada ao cinto. Até perdermos a inocência o pai era o nosso Pai Natal. Era a nossa realidade infantil. A sala ficava numa desordem colorida. Havia brinquedos e papel de embrulho por todo o lado. Um doce caos, concluiu a mãe. Agora já não temos crianças, disse a avó, que no privilégio condenado da sua velhice, tinha acompanhado os Natais de três gerações díspares. Tinha visto a mãe, eu as manas e os bisnetos. Foram todos diferentes. Épocas diferentes relembrou saudosa. Fixou-me piscando o olho dizendo, ninguém tinha essas geringonças, bzzz, apontando para um dos telemóveis que tinha, precisamente, acabado de vibrar. Bzzz. Ninguém era incomodado de minuto em minuto. Conversávamos. Estávamos. Líamos. Há quanto tempo ninguém lê livros? Hein? Há quanto tempo? Eu estou a ler avó. Não era para ti querido. Eu já sei que sim. Mais ninguém viria a afirmar leitura. A avó ia com o olhar a todos os cantos da mesa, a todas as caras. Entre desvios e introspecções, o silêncio reinou. O papel, as páginas, o cheiro. Se calhar já ninguém se lembra… Os écrans tácteis, as teclas, os wifis vencem. Dizem-me que estamos mais perto ao longe, mas eu refuto imediatamente. Não! Não são polvilhos de gostos que me preenchem. Troco-os por abraços. Transformava-os em beijos. Subitamente o Natal parecia desvanecer outra vez. Mas eu queria espairecer. Queria o Natal do costume, até porque depois deste momento, eu tinha a certeza que os presentes que tinha trazido iriam ser os indicados. Livros. Tinha trazido livros para todos. Foi uma tarde comprida, prometedora. As livrarias apaziguavam-me sempre. A tranquilidade duradoura de saber que naquelas prateleiras, atrás de lombadas e capas, podem estar todos os saberes e sonhos do mundo. E eu escolhi para eles os pedaços que achei mais convenientes e coniventes. Embrulhei a gosto ficções, romances, poesias. Tudo. Num papel rubro de fitas douradas. Mas não sem antes me demorar a rabiscar na contracapa dedicatórias. No da mãe relembrei-lhe novamente o pilar que ela é,
cada vez mais. Nos das manas redobrei-lhes em palavras o amor que lhes sinto. Nos restantes, desprendi-me de mim, fiz-lhes valer a importância que representam. Em todos fui eu mesmo e não apenas escritos de circunstância. Presumo que possam ser os pontos de partida necessários para a magia que surge desde o folhear das primeiras páginas. O jantar terminara. Na televisão, o Presidente já tinha desejado a todos os concidadãos o melhor Natal possível. A mana sorridente, indicou que as prendas não se iriam abrir sozinhas. Concordámos. Eu voltava a pensar no pai. Desde que ele morrera, era sempre assim. Por entre as decorações imaginava-o a aparecer novamente. Vermelho. Eléctrico. Imbuído no seu artifício natalício. Oh oh oh. Parece que ainda agora o ouço. Mas é passado. Libertei-me. Abandonei esse pensamento mais sombrio. Esses pais Natais já não voltam. Concentrei-me neste presente de memórias futuras. Parafraseei mentalmente a mãe, o doce caos. Papéis rasgados pela curiosidade infantil de saber o que escondem e fitas enroladas a jazerem no chão. É só mais um Natal afinal. O nosso. O que importa. Esperei buliçoso que as prendas se esgotassem. Quis guardar as minhas para o final. Os livros teriam que ser impactantes, expectei. Distribuí um a um. Leram todos a contracapa como sugerira. Sei que naquele momento a internet deixara de existir. As únicas conexões válidas eram entre nós todos, com o sinal de rede a marcar o débito máximo. Harmonia de sorrisos e algumas lágrimas. Abracei-os. Hoje sim! Hoje sim afinal é Natal.

 

André Marinho (Outubro de 2017)

SOBRE O SILÊNCIO

Aquele que tudo diz
Sem nada se ouvir para os olhares surdos,
Conversas sem som!
Falar em silêncios
Entender silêncios
Conversas de olhares
Actos preciosos de quem se entende sem falar
Comunicar com o respirar
Troca de olhares com mil palavras
Respirar conforto na sua ausência
O bom que é
O bem que faz
Saber que há alguém, neste mundo,
Que carrega e guarda os nossos silêncios
Sem nada dizer
Saber que existe um alguém
Com quem nos podemos calar

Mafalda Pereira

LE RÔTI ET LE PIGEON

cropped-dscn1194.jpg

Un rôti ficelé comme un bourgeois déambulait sans en avoir l’air dans les rues d’une paisible bourgade. Pas un arbre à l’horizon, on se serait cru en Provence. L’air sombre du soir dégringolait comme une soupière sur les paupières du voisinage. L’atmosphère était paisible si ce n’était les hurlements saccadés d’un marteau piqueur isolé qui mendiait sa pitance. Et les gens faisaient une haie d’honneur au rôti pour célébrer sa présence. Certains même se traînaient au sol en espérant que sa traîne de viande lèche leur corps pour le purifier d’avoir mangé trop de cinq fruits et légumes par jour – les plus pauvres bien entendu. Mais la trajectoire du paquet de chair ficelé évitait scrupuleusement les dépouilles vivantes. La vie brrr! Quel effroi! A quoi cela peut-il bien servir à qui est au-dessus de tout cela? Les rampeurs espérants avaient l’air abattu.

Un pigeon survint à Agen qui cherchait la devanture d’un magasin, mais en vain. Il se dit qu’il n’avait rien à faire en Provence et donc s’y dirigea sans tarder de toute la force de ses plumettes volontaires. Elles trépidaient dans le vent et faisaient avancer le volatile à une vitesse tellement intense qu’il se posa aussitôt dans les rues d’une paisible bourgade. Celle dont il était question dans la première phrase de ce texte qui est en train de s’écrire. Quelle aubaine pour la personne écrivant qui, se frottant les mains, se dit tout de go : « Chouette! On dirait bien qu’il pourrait se passer quelque chose par ici ». La personne se cacha aussitôt derrière une palette de fruits pour observer attentivement la scène, munie d’un crayon et d’un bloc-notes, prête à écrire la suite de l’histoire. Prête également à ne pas trop se fouler et à juste retranscrire ce qu’elle pourrait voir, sentir, entendre… La personne ne s’était pas rendue compte que la palette à végétaux présentait une intense contradiction en son sein puisque chair et fruits ne font pas bon ménage.  Sauf bien entendu avec l’aide de la fleur de sel, qui était par malheur en rupture de stock ce jour-ci – les fleuristes de sel étaient en grève, amers de n’avoir pas su négocier une élévation du niveau des salaires. L’assemblage boisé carno-fruitier explosa aussi sec dans l’air du soir, emportant avec lui dans la mort la personne qui écrit ce texte.

L’histoire se termine ainsi, faute de mains pour la continuer voire la terminer… on ne sait jamais avec les personnes qui écrivent, dès qu’elles ouvrent leurs mains, cela peut durer, cela peut ne jamais s’arrêter.
Tout juste pouvons nous retranscrire ce que quelques témoins en on dit. Ainsi, le pigeon et la chouette firent face au rôti, lui tenant à peu près un langage que le paquet de chair prit mal. Surestimant sa force, ce dernier sauta mollement sur la patte du pigeon alors que la chouette disparut, elle n’était qu’issue de l’imagination de la personne qui écrit cette histoire et qui est morte, rappelons le. Le pigeon défit le ficelage – on se serait cru à Noël – et toute la population dévora le rôti dans un silence atroce à moudre du grain. L’oiseau prit la population sous son aile, s’éleva, puis il saupoudra la Terre des germes humains. Une vieille ficelle pour faire son intéressant. Quelques années plus tard, le pigeon mourut d’une cirrhose une fois, et il ne mourut plus jamais par la suite.

Lorsque l’on se dandine dans l’admiration, il ne faut pas s’étonner de se faire bouffer tout cru. Et si une chose n’arrive jamais seule qu’une fois dans une vie, quoi de moins évident que de ne pas refuser l’inéluctable prééminence d’un peuple sous le fardeau des préséances. Encore faut-il lui dévoiler la réalité des choses, que cela fusse un rôti, ou même, en Provence. Et pour cela quoi de mieux qu’une personne vivante qui écrit? Telle est la morale de ce fabliau médiéval.

Aurélien Moreau

 

DANS UNE PELOUSE

cropped-dscn1194.jpgDans une pelouse en mousse inspirée par le froid

Se bécotaient des mousses en partance pour le bois.

Leur bateau en cale sèche leur laissait du temps libre;

Ils sautèrent dans la brèche, ils en avaient la fibre.

Des troncs de réverbères ponctuaient la noirceur

De ce débarcadère s’enfonçant dans la peur :

Poutrelles métalliques sur des vagues immobiles,

Voiles disséminées sur l’océan pané

De branches et de piques protégeant son nombril

Et des proues énervées déchirant les genêts.

Nos braves moussaillons malgré leur expérience

Etaient désorientés par la stabilité

L’immuabilité n’est pas leur tasse de thé

Et boire le bouillon devint leur espérance.

Déshydratés, perturbés

Et bientôt contaminés

Par un violent mal de terre

Sur l’humus ils se coulèrent.

Ils firent la bassine pour préserver leur vie

Attendant du secours qui ne surgissait pas

Il fallait voir leur mine pour savoir leur avis

Sur le sens et le cours, le pourquoi de ces bois.

Et progressivement l’angoisse s’envola.

Affronter par moments la cause de nos effrois

Est le meilleur remède et la meilleure issue

Des mécanismes raides qui hantent nos vécus.

Car l’existence est vague

Et puis elle aime en terre.

 

Aurélien Moreau

LE RECITAL DU PLATANE

cropped-dscn1194.jpgChaque matin, sur le chemin qui me mène au jardin botanique, je croise un platane.
Enfin, trois platanes enchevêtrés.

Ils donnent face au lac.
Installés à même le quai, leurs racines sous le goudron du chemin piétonnier qui longe la rive. Elles doivent chatouiller les enrochements qui dressent une barrière imaginaire entre eux et le lac.

Imaginaire, car je sais bien qu’entre eux il n’y a pas de limite franche
Ils communiquent.
Le platane (car il y en a trois mais en vérité c’en est un seul), étire ses longues branches capillaires vers la surface.
Et derrière, vers le lac, la montagne des Voirons, l’Est.

C’est un platane un peu laisser-aller.
Son immense chevelure pend négligemment au-dessus de l’eau.
Et pendant qu’il s’adonne, comme chaque matin, à sa rêverie contemplative,
Que respirent, chacune de ses ramifications,
En même temps, il chante.
Ce chant !
Je vous le dis, tous les matins, et les soirs, même, il chante.
C’est à s’en décrocher le cou.
Ils doivent être quatre, aller, cinq, ses oiseaux.
Leur chant est clair et exotique.
Je ne saurais, d’ailleurs, en déterminer l’espèce.

Ce dont je suis sûre, c’est que ce soprano, un de ces quatre matins, il ne sera plus là.
Il est trop fantasque.
Comme ses oiseaux,
Perché(s)

Un jour, il va s’envoler.

Mila Soda

 

PELURE D’ORANGE

cropped-dscn1194.jpg

Dans la grande corbeille à fruits

Trônant sur la table du salon

Et rappelant à n’importe qui

Que la simplicité du passé

A quand même du bon

Une orange

Perdue au milieu de ses congénères

Au milieu de ses frères

Agrumes

Une orange

Parmi tant d’autres

Et je ne peux m’empêcher

De penser à toi

Je te déshabille

Mais tes vêtements

Piquent mes yeux

Amertume

Et font couler d’eux

La substance lacrymale

Me rappelant

Que tu n’es pas là.

 

Aurélien Moreau (Pontarlier, 26 août 1997)

ADOLESCENTE

cropped-dscn1194.jpg

Insuportáveis ou indiferentes. Já nem os defino. Já não os sei diferenciar. O corpo foi-se habituando a esse massacre de gritos, que me oferecem todos os dias, todos os minutos e segundos. Parece que para os alimentar, eu preciso apenas de respirar, de existir… Ainda era o vosso filho. Ainda era o vosso pequeno, que cresceu sem vocês me terem preparado para isso, sem sequer, algum de vós ter dado por isso. Deixaram-me cair e levantar sem por uma vez me lamberem as feridas. E eu era vosso, assim como sentia que vocês eram meus. Mas cresci e vi que cada um de nós optou por fazer caminhos diferentes. Sem contactos, sem comunicações. Eu adolescente. A querer-vos como guias, a querer-vos como aliados da viagem, desta travessia dolorosa da adolescência. Tantos porquês! Tantas transformações… Sou o quê? Criança? Adulto? Onde estavam nessa altura, pai, mãe? Estavam nos gritos que me dilaceravam os tímpanos e desfiguravam a mente. No cinto que me estalava nas costas. No jantar, que tantas vezes era um amargo nada. Lágrimas? Lágrimas tantas. Noites de insónias, onde eu combatia vocês e o mundo. Conflito infinito neste corpo em constante mudança. Perceberam alguma vez isso? Viram-me frágil, viram-me céptico. Zero vezes correram em meu auxílio. Outras zero vezes me abraçaram. Um beijo ou um qualquer carinho fugidio, mesmo que forçado, talvez tivesse alterado o destino. Talvez tivesse promovido o amor entre nós todos. Desleixamo-nos. Eu e vós… Pai, mãe! Os vossos defeitos vão comigo. Os meus também estão cá todos, a lembrarem-me que não existem perfeições. Mas que existem dentro e fora dos sonhos, cumplicidades ternas de um amor que deveria ter sido incondicional. É assim que funciona em todo o lado. Cria e progenitores. Laço único. Agora fecho-me em mim. Preso em mim. A sentir-me como vosso inimigo. Tantas vezes castigado pelo silêncio, outras tantas pelos vossos insultos, que eu apontava numa lista e guardava no coração. Acabo por ser esse ser estranho que o teu e o teu olhar denunciam. Sou também o arrependimento que o vosso coração sente. Não nos merecemos. Adeus. O pai foi o último a chegar a casa. Veio o mais depressa que pode, quando a mulher lhe ligou, sem conseguir explicar o que fosse. Percebeu a tragédia pelo pranto ininterrupto. Junto ao corpo, em soluços, a mãe ainda com a carta, nas duas mãos, olhava o corpo como se o quisesse ressuscitar com o olhar. O pai atordoado, sem saber o que fazer. Lágrimas e mais lágrimas, foi o que de espontâneo saiu. Verificou o corpo, que já estava gelado. Que já tinha partido com o respirar último. Ajoelhou-se então e leu a carta, as lágrimas dobraram e impediam-no de ler com discernimento. No fim, abraçou a mulher, a mãe do agora cadáver. Ela retribuiu de imediato o abraço. Os pensamentos de ambos em uníssono, reflectiam remorsos e culpas. Falhas parentais. Falhas de amor. Acabou-se-lhes este ciclo. Iniciara-se agora o do luto eterno.

André Marinho ( Outubro de 2016 )